mardi 31 janvier 2012

MICHEL ROTH, SES DÉBUTS

Il est né au pays de mon père. Et j'ai bien connu le sien. Mais ma rencontre avec Michel Roth n'a eu lieu que sur le papier.
Retour en 1977.
  
Triomphe imminent


Michel Roth à "La Charrue d'Or", aux côtés de Charles Hermann, en 1977.


Dans un article du « Républicain Lorrain » de Sarreguemines, en 1977, mon confrère et ami Wolfgang Thielen souligne malicieusement que j’ai présenté avec succès une tourte du chef réalisée de mes mains à la « Poêle de Fer » des journalistes, cette année-là. Une manière de mêler mon chef-d’œuvre unique à l’immense talent de Michel Roth ! Carnaval est toujours un peu présent dans la vie sarregueminoise…

Plus sérieusement, Michel Roth a alors 18 ans. « Pendant que ses camarades se passionnent pour la moto, lui touille dans les casseroles. Pourquoi ?
» questionne Wolfgang Thielen :

- Parce que cela me plaît, répond Michel Roth

Réponse un peu courte quand on sait à quel point il peut se montrer inventif. Ses parents à Hambach, à l’étang Saint-Hubert, étaient restaurateurs. Élevé dans un tel milieu, on commence par regarder puis on met soi-même la main à la pâte. Alors qu’il accomplit sa formation, dès qu’il en a le temps, Michel  retourne au fourneau paternel et donne un coup de main pour les banquets, le décès du père, il y a deux ans, en 1975, a laissé un vide.
 
Michel Roth se montre, petit à petit, plus disert :

La cuisine n’est pas un métier, c’est un art. Si on ne s’y intéresse pas, ce n’est pas la peine de suivre cette voie.
 
La route est longue pour l’apprenti cuisinier qui veut devenir un maître queux. Il a commencé par choisir un bon maître : Charles Herrmann, le chef de « La Charrue d’Or », l’un des cinq diplômés du « Club Prosper Montagné » en Moselle.
 
Les débuts d’un apprenti cuisinier sont toujours les mêmes :

- J’ai épluché des pommes de terre et des carottes. On regarde faire les autres, on participe à la décoration des plats, on commence par donner un coup de main. Après 8 mois, on obtient la responsabilité d’un rayon : le garde-manger ou les desserts, par exemple. Puis, l’on s’occupe des potages, des poissons avant de passer aux grillades. Enfin, l’on arrive au plus difficile : les sauces.

Quatre ans pour faire ce chemin jalonné de leçons théoriques au CFA Fulrad. Le CAP est une première étape. Quelque 9 000 jeunes s’y présentent chaque année, 200 d’entre eux concouraient à Metz. 

«Michel s’est classé premier», écrit Wolfgang Thielen, observant qu’«à vrai dire, il ne pouvait pas lui arriver autre chose. L’épreuve est entièrement fondée sur un livre de cuisine contenant une centaine de recettes. Michel Roth le connaissait par cœur» ! 

Lors de l’interview de 1977, mon confrère tente une diversion :

- Au fait, qu’aimes-tu lire Michel, durant tes heures creuses ?
 
- Mais des livres de cuisine, bien sûr, des recettes et des livres sur la vie des grands maîtres !
 
Premier apprenti cuisinier de Moselle, Michel Roth se trouvait qualifié pour le concours régional à Colmar. Il s’y classe encore premier et va à Paris.
 
«En demi-finale du concours national, le menu est imposé : merlan à l’anglaise, beurre maître d’hôtel, poularde pochée, sauce suprême, riz pilaf, soufflé au chocolat» détaille Wolfgang Thielen.

Les 13 meilleurs se retrouvent en finale et parmi eux Michel Roth. Et l’on recommence : turbot farci à la mousseline de merlan, sauce champagne, carré de veau porte Maillot, crêpes soufflées au Grand Marnier.  Le verdict : Michel Roth se classe 8e apprenti de France sur 9 000.
 
Michel Roth a son CAP en poche. Son apprentissage continue. Voulant devenir maître, il doit d’abord voyager, faire le tour de France des restaurants réputés, travailler humblement… On connaît la suite.

En 1991, c'est la reconnaissance suprême avec le Bocuse d'Or et le titre de Meilleur Ouvrier de France. En 2009, directeur des cuisines du Ritz, il reçoit sa deuxième étoile au Guide Michelin.

Michel Roth est aujourd'hui le symbole d'une tradition culinaire à son plus haut niveau. Il incarne l'obstination et le perfectionnisme d'un chef qui, selon son expression, a choisi son métier "pour rendre les autres heureux".


Sylvain Post  journaliste honoraire & auteur

Pour accéder au site officiel de Michel ROTH, cliquer sur ce lien.

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La Poêle de Fer 1977


Poêle de Fer 1977 du Club de la Presse de Metz-Lorraine, sous l’œil expert de Paul Bocuse, Alain Chapel, Jean-Pierre Haeberlin, Marcellin Terver et bien d'autres.
- Sur la photo, accroupis, de gauche à droite : Eric Martin, Guy Wagner, Michel Charton, Jean-Michel Bezzina, Paul de Busson, (?), Bernard Ferreira, Pierrot Vincent, Michel Chapellier, Christian Morel.
- Debout, au deuxième rang : Jean Larpenteur, Odile Le Bihan, Vincent Manuguerra, Michel Pellet, François Vincent, Marcel Zanini, Tim Marie Rose Manuguerra, (?), Jacques Navadic, Paul Bocuse, (?), Alain Chapel, Paul Irthum, (?), Claude-Henry Laval.
- Au troisième rang :  Armand Knecht, Sylvain Post, Jean-Marie Rausch, Gaston Schwinn, Gilbert Mayer, Jean-Pierre Jager, Michel Colson.
Le trophée a été remporté par  Paul de Busson, chef photographe du "Républicain Lorrain". J'ai été "nominé" pour ma tourte lorraine à la viande marinée dans du vin blanc, réalisée de mes mains (pâte comprise), d'après une recette du regretté Jean-Claude Schneider, un ami sincère et généreux, chef étoilé du Saint-Walfrid à Sarreguemines. 

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Hubert Cleuvenot s'est éteint
 
Notamment connu pour avoir fait des Chanoinesses et des Ducs de Lorraine, restaurants situés à Remiremont et Epinal, des étoilés du Guide Michelin, Hubert Cleuvenot avait également créé une section du club gastronomique Prosper-Montagné, dont il était délégué général pour l'Est de la France et les pays étrangers frontaliers puis le vice-président national.


Ce passionné de gastronomie s'est éteint à l'âge de 95 ans, le 1er mars 2012. Hubert Cleuvenot était venu à l'Auberge Saint-Walfrid, à Sarreguemines en décembre 1977, pour y préparer une action d'envergure régionale du Club Prosper-Montagné. 

lundi 16 janvier 2012

VOLCANS DE L'EIFEL

Ruées ardentes sur
les microminéraux

L'engouement pour les collections de microminéraux
apparu en France il y a une trentaine d'années,
fit découvrir à des Lorrains le parc volcanique de l'Eifel,
au confluent de la Moselle et du Rhin.
Echappée belle sur les rives du lac de Laach, une caldeira,
à moins de deux heures de route de Metz.


  Hématite en losange, collection Fred Kruijen ©

 
Le volcanisme, dans cette région située à proximité de Coblence, Mayen et Andernach, a commencé il y a 50 millions d'années, à l'ère tertiaire. Il a créé de nombreux bouleversements du paysage originel par les édifices volcaniques, les coulées de lave et la large couverture de projections au sein desquelles les prospecteurs recherchent des minéraux, tels que l'hématite en forme de losange et l'haüyne, autrefois appelée saphirine en raison de ses éclats bleus, la tridymite, le rutile, le zircon, la rhönite, la magnétite, la pseudobrookite... 
 
Taper le caillou. C’était au temps des sorties sur le terrain proposées par la jeune association GEOLOR, créée à Thionville par un groupe d’amateurs des sciences de la terre. Des amateurs scientifiques ouverts à toutes les disciplines de la géologie : paléontologie, minéralogie, pétrographie… De l’infiniment grand – la formation de la Terre, notre mère à tous – à l’infiniment petit : les cristaux microscopiques mis à la portée des prospecteurs par les convulsions du globe.

En France on a commencé depuis les années 1980, à s’intéresser aux microminéraux. Les collectionneurs de minuscules cristaux – les « micromonteurs », terme dérivé de l’anglo-américain « micromounts » – sont généralement habiles de leurs doigts, car il faut conditionner les échantillons de manière à les adapter à la boîte choisie et les y fixer.

Un micromount est un minéral dont on ne peut apercevoir clairement les cristaux à l’œil nu. Il faut  pour cela employer une binoculaire avec, de préférence, un éclairage en lumière froide par fibre optique ou, aujourd’hui, les leds.

Les qualités esthétiques des échantillons sont parfois plus intéressantes que celles des pièces plus importantes. Et, surtout, ils prennent beaucoup moins de place. L'amateur éclairé peut donc envisager des collections systématiques, quasi-exhaustives d’un site prospecté. Sans envahir le salon. Passer à la loupe les microcristaux du parc des volcans éteints de l’Eifel, à moins de deux heures de route de Metz, Thionville ou Forbach, était l’objectif  des membres de GEOLOR. 
 
Cap sur l'Eifel volcanique, en Rhénanie-Palatinat, qui s'étend du Rhin à la vallée de Wittlich, sur un territoire d'environ 2 000 kilomètres carrés, naturellement divisé en trois parties :
- l’Eifel volcanique occidental (Manderscheid, Daun, Gerolstein, Obere Kyll, Hillesheim)
- le Haut-Eifel volcanique (Adenau, Kelberg, Ulmen et Nohn),
- l’Eifel volcanique oriental (Brohltal, Vordereifel, Mendig, Pellenz)
Le centre de l'Eifel volcanique correspond à la région de Daun - Manderscheid, dans le district de Mayen-Coblence.
Certains scientifiques attribuent le volcanisme de l'Eifel à la présence d'un point chaud ou panache. Les éruptions les plus récentes remontent, d’après les experts, à une période située entre 10.000 et 20 000 ans.

Le lac de Laach (Laacher See) est un lac de cratère ou plus exactement une caldeira, à proximité des villes de Coblence, Mayen (11 km) et Andernach (14 km), qui s’est formée lors d’une éruption survenue il y a 12 900 ans. Des spécialistes affirment qu’elle a été 250 fois plus importante que celle du Mont Sainte-Hélène, en 1980.
Lors des différentes phases éruptives du Laacher See le débourrage du conduit est survenu au moment de la rencontre entre le magma et l’aquifère. Un panache ascendant de cendres et de gaz s’est formé et s’est élevé à haute altitude. Cette éruption a été la plus puissante du Quaternaire en Europe centrale et similaire par ses émissions, à celle plus récente du Pinatubo. La dispersion des tephras émis par l'explosion du Laacher See atteignit au nord, la Suède, et au sud, le Piémont italien.

Aujourd'hui, la caldeira est occupée par un lac de cratère de 3,5 kilomètres carrés et d’une profondeur de 55 mètres, toujours considéré comme un volcan actif. On le constate par une activité sismique répétée et de fortes anomalies thermiques sous le lac. Au mois d’avril 2010, un séisme d’une magnitude de 3,2 sur l’échelle de Richter, a touché cette région. Son épicentre a été localisé sur les bords même du Laacher See, à 25 kilomètres à l’Ouest de Coblence. La faiblesse de la magnitude, certes ressentie, n’a pas causé de dommages. Durant la même période, le dégagement de gaz carbonique sur la rive du lac s’est intensifié, montrant que le séisme était bien d’origine volcanique.
 
C’est dans les environs de Maria Laach que GEOLOR établit son "camp de base". Partis en éclaireurs, nantis de toutes les autorisations requises et bénéficiant du bagage universitaire de Jean-Paul LAGARDE,  nous avions, Kléber BOULIEZ, Christiane STREIT et moi-même en tant que président, repéré les lieux, aidés en cela par les habitants. Le bilinguisme a du bon.

Le groupe de Géolorrain(e)s en revint avec quantité de microminéraux dont l’étude eut été impossible sans le livre de Gerhard Hentschel Die Mineralien der Eifelvulkane. Cette "bible" pour géologues de tout poil, est un des nombreux reflets du dynamisme de cette région, lisible à tous les niveaux , les principaux secteurs d'activité étant la production de matériaux de construction. Et, de plus en plus, avec ses carrières et ses musées spécialisés, le tourisme géologique.
  
Sylvain Post  journaliste honoraire & auteur 

 

Haüyne
  
 
L'Eifel volcanique. Photo Martin Schildgen ©
  
 
MINÉRAUX DES HOUILLÈRES
  
Les Gallois transforment l'essai

    
Millérite de La Houve - Creutzwald, collection privée
 
Millérite du Pays de Galles, National Museum Wales

Selon que vous vous trouvez au Pays de Galles ou en Lorraine, les collections minéralogiques des anciennes mines de charbon n'ont pas le même statut. À Cardiff, les minéraux des houillères ont leur place au musée. Dans le bassin houiller de Moselle, ils n’intéressent personne, excepté quelques collectionneurs.
 
Parmi ces minéraux, la très recherchée millérite (sulfure naturel de nickel, NiS) longtemps introuvable, jusqu’au jour où les amateurs de géologie comprirent qu’elle était soluble dans l’eau et qu’il fallait éviter de passer les échantillons sous le robinet avant de les étudier à la binoculaire…
 
De fait, ces minéraux renvoient à la mise en place du gisement charbonnier lorrain, formé il y a quelque 300 millions d’années. Le gisement sarro-lorrain a subi les grands mouvements tectoniques, puis les effets du soulèvement des Alpes. Les plissements, fractures, failles qui en ont résulté ont  bouleversé la belle ordonnance initiale des dépôts carbonifères nés dans la quiétude tropicale.
 
L’eau, capable de dissoudre certains éléments, de désagréger des roches pour ensuite les transporter, soit chimiquement, soit mécaniquement,  a agi tel un agent corrosif fabuleux. Attaquant le relief, mais parvenant aussi à dissoudre, à dissocier puis à réassocier des éléments dans la zone superficielle et en profondeur. À la base des terrains, servant d’appui aux strates carbonifères, se situent les brèches, poudingues, conglomérats, grès, quartz en gros noyaux liés et cimentés entre eux.
   
Séparant deux bancs de charbon, les morts-terrains ont livré des roches sédimentaires. Les apports terrigènes venus des reliefs périphériques ont formé les argilites ou schistes, riches en empreintes végétales, marquant l’ancien sol de végétation. Les siltites couleur rouge-brun, constituées de fines particules détritiques consolidées, proviennent de la dégradation des roches anciennes. Des éléments plus grossiers ont donné naissance aux grès et conglomérats. Ces derniers comportent des galets de quartz laiteux liés par un ciment feldspathique. C’est un détail qui compte, car les feldspaths sont des silicates contenant des traces d’éléments métalliques qui seront libérés lors de l’altération de ces roches par hydrolyse.
 
Le soufre a joué un rôle central dans ce laboratoire naturel. Sa formation est directement liée à celle du charbon. Après immersion, la végétation a été altérée par des micro-organismes. À l’abri de l’oxygène, la matière organique a subi une réduction (l’inverse d’une oxydation, destructrice) et elle a libéré des ions sulfures sous l’action des bactéries.
 
De même, des ions sulfates des matières minérales se sont transformés en ions sulfures. La grande affinité des ions métalliques pour les ions sulfures a amené leur combinaison sous forme de sulfures métalliques. Les phénomènes de diagenèse (formation de roches par augmentation de la température et de la pression, liée à la subsidence) expliquent la présence de minéraux sulfurés. L’augmentation de température a favorisé la redissolution des sulfures, mais parallèlement les phénomènes de compaction, liés à la masse des sédiments, a provoqué une forte circulation des fluides interstitiels qui a eu pour conséquence d’expulser une partie des fluides, donc de concentrer en ions les fluides restants, favorisant la cristallisation. Des filons hydrothermaux se sont ainsi formés.
 
À la mine de La Houve, à Creutzwald, la sidérite, couleur brun clair à foncé, se présentait en cristaux presque centimétriques. En rhomboèdres, beaucoup plus rares, ces cristaux étaient parfois transparents et toujours brillants. La calcite-ankérite, carbonate naturel de calcium cristallisé, était souvent présente en gros rhomboèdres ou en petits cristaux incolores. On trouvait la pyrite, sulfure de fer dont la cristallisation appartient au système cubique, à proximité des végétaux fossiles. La chalcopyrite accompagnait la sidérite, la barytine massive et la sphalérite (sulfure naturel de zinc, ZnS) en gros cristaux bruns tirant vers le noir. Le plomb est présent sous forme de sulfure : c’est la galène (PbS), en cubes millimétriques. Mais la millérite, en gerbes de fines aiguilles, reste la star de cet univers minéral. Pour ceux qui veulent bien la voir ainsi.

 
Sylvain Post  journaliste honoraire & auteur 


 


Sphalérite de La Houve, collection privée

 
Sulfure naturel de plomb de La Houve, collection privée
 

dimanche 15 janvier 2012

BON SANG NE SAURAIT MENTIR...

Louis XIV pensait faux !

Lorsque Louis XIV  imposa sa souveraineté à la Sarre, il laissa aux princes de Nassau-Sarrebruck la possibilité d’exploiter le charbon. Wilhelm-Heinrich Von Nassau-Saarbrücken (1718-1768)  étatisa à sa manière les mines de son domaine, afin d’engager une stratégie préindustrielle pour l’avenir de ces houillères.
 
S’il existait, en France, des redevances pour les gisements de minerais métalliques, 
il n’y avait pas, à l’époque, de concessions au sens strict pour le charbon. Louis XIV accorda en 1698 à tous les propriétaires du sol, le droit d’exploiter des mines de houille dans leurs fonds. Oubliée, la Grande Maîtrise des mines et minières de France que Henri IV avait créée en son temps...
 
Louis XIV, le modèle des souverains et Colbert, le meilleur des conseillers du roi, firent preuve d’un réel manque d’intérêt pour le charbon. Ils pensaient faux !  Comme si la France du XXe siècle passait à côté des nouvelles technologies…
 
Bref,  la France de Louis XIV, centralisée et absolutiste, où le roi gouvernait seul, n’accordait au charbon qu’un rôle de second plan, tandis l’Angleterre de la fin du XVIIe siècle, avec sa Glorieuse Révolution de 1688, allait faire le contraire.   
 
En Angleterre, le régime représentatif qui remplaça l‘absolutisme royal, fournit un contexte favorable au lent processus qui aboutit à la révolution industrielle, avec une bonne longueur d’avance sur l’Europe continentale.
 
Malgré les circonstances favorables aux princes, en Sarre, l’extraction par galeries atteignit à peine 50 000 tonnes sous l’Ancien Régime. C’est peu, mais cette production porta en elle les pronostics sur l’avenir houiller de cette région.
 
Après la Révolution, la Sarre devint un département français, avec comme chef-lieu la ville de Trèves. C’est Napoléon 1er  qui décida de partager le bassin sarrois en soixante concessions. Sa production doublera en l’espace de 5 ans. 
 
Toutefois, l’aventure charbonnière française sur la rive gauche du Rhin tourna court avec Waterloo et la perte de la Sarre, en 1815.
 
Dès 1816, on chercha du côté de Schoeneck, le prolongement du gisement perdu.  S'ensuivit l'annonce solennelle par Napoléon III de la découverte du bassin houiller mosellan. Une annonce singulièrement décalée dans le temps puisqu'elle intervint en 1858, soit 40 ans après le fonçage du premier puits en territoire français près de la frontière.
 
La posture triomphante de Napoléon III fut rapidement écornée par la honteuse défaite de 1870, la perte de l'Alsace-Moselle et l'exploitation par l'Allemagne, du charbon lorrain durant un demi-siècle.


SP


 
PALÉONTOLOGIE
 
Un poisson-lune de 180 millions d’années
à Thionville
  


 
Le poisson fossile le mieux conservé parmi ceux qui ont été trouvés en octobre 1986, sur le chantier de l’autoroute à THIONVILLE-ÉLANGE, a pour nom Tetragonolepsis semicincus. Il appartient au Toarcien inférieur, ce qui lui donne l’âge respectable d'environ 180 millions d’années…
Cette espèce a été décrite pour la première fois par BROWN, en 1830. L’exemplaire trouvé par Christ MAROT, membre actif de GEOLOR à THIONVILLE, mesure moins de dix centimètres de longueur. Il est distinct des autres poissons par sa forme ronde et la privation apparente de nageoires dorsales et ventrales. Sa forme lui vaut le surnom peu scientifique de poisson-lune.
Dans la région ventrale les écailles gagnent en longueur et ressemblent à d’étroites plaquettes. On en compte environ trente rangées.
Sa nageoire caudale est homocerque, autrement dit ses lobes sont égaux, tandis que la colonne vertébrale de ce poisson osseux est légèrement courbe.
Quant aux dents, elles sont nombreuses, très fines, et se modifient en « pavés » à l’intérieur de la bouche.
D’après Jean-Claude STREITZ, grand amateur luxembourgeois, auteur du livre Auf der Fossiliensuche in Luxemburg (Ed. Sankt-Paulus Druckerei, Lux. 1983), ce poisson est l’un des plus rares de la mer du LIAS.
Deux exemplaires ont été trouvés à BETTEMBOURG, il y a quelques années. Trois autres appartenant à des collections particulières, ont été découverts dans les schistes bitumeux de SCHOUWEILER (G-D L).
La rareté du fossile trouvé par Christ MAROT mérite d’être soulignée. De même, on peut se féliciter de ce que l’intéressé ait fouillé avec méthode, n’hésitant pas à signaler sa découverte pour en permettre l’étude et la publication.




Sylvain Post  journaliste honoraire & auteur 

POURQUOI ILS ONT DES CHAPEAUX POINTUS



Nains &
légendes minières 



On s’est beaucoup amusé des vols humoristiques survenus à l’instigation du Front de libération des nains de jardin et de la farce du nain qui a fait le tour du monde avant de retrouver la pelouse de son propriétaire.
Mais, s’est-on demandé pourquoi les nains portent un chapeau pointu ?
L’adaptation du conte des frères Grimm en dessin animé dans le film Blanche-Neige et les Sept Nains donne aux nains une image indéfectible de petits personnages exerçant la profession de mineur… 
Or, très sérieusement, des chercheurs ont conclu que les chapeaux pointus rembourrés leur évitaient des blessures à la tête dans les profondeurs de la terre.

Voilà une thèse qui offre une transition vers le folklore minier. Celui-ci est peuplé  de sympathiques Bergleute (ou Bergmännchen) – littéralement «petits hommes de la montagne» ou de la mine –  mentionnés depuis le XVIe siècle dans la littérature allemande, de kobolds, aux côtés des Nickel et Schachtzwergl d'Autriche, des Solilubki de Pologne, des redoutables Wichtlein d’Allemagne du Sud, qui provoquent des éboulements dans les mines, ou encore des Erdluitle (ou Bergfolk) au Danemark. L’Amérique du Sud, l’Amérique du Nord, l’Afrique et l’Inde ne sont pas en reste.
La plupart des gnomes qui nous semblent familiers sont issus de la mythologie nordique et des croyances germaniques. Tous les nains ont une parfaite connaissance des minerais qu’ils extraient des profondeurs de la terre. Dans la Chanson des Nibelungen (en moyen haut-allemand Nibelungenlied), une épopée écrite vers 1200, les nains possèdent de grandes richesses mystérieusement tirées de leurs mines en-dessous des montagnes qu'ils habitent. Ce qui leur vaut la considération des princes et la méfiance des manants.
Pour une partie des spécialistes, les nains sont issus de la personnalisation des forces naturelles. Certains supposent qu'ils étaient originellement des "esprits" liés à la terre, lesquels ont revêtu une forme humanoïde dans la mythologie nordique. Les nains n’ignorent rien des secrets de la nature; ils vont jusqu'à devenir les amis de l'homme.
Faut-il s’étonner alors de la popularité du Gartenzwerg en Allemagne, du Garden gnome en Angleterre, du nain de jardin en France ?
 
Sylvain Post  journaliste honoraire & auteur 

 

RAID CITROËN

Il y a 40 ans, deux Mosellans

sur le Paris-Persépolis

 

Contrôle de départ, à Rungis - © Photo Pierre Lacasta


 
À 18 ans, avec un permis en poche depuis moins de 6 mois, Serge Kottmann, de Freyming-Merlebach, et Gérard Colette, de Cocheren, n’avaient pas hésité à participer au raid Paris-Persépolis-Paris organisé par Citroën, en 1971.
Le 31 juillet de cette année là, les voilà partis pour couvrir 13 788 kilomètres au volant d'une 2CV. Serge de préciser : « Mon père me l’avait achetée pour que je puisse participer aux épreuves qualificatives, avec l’espoir d’être sélectionné pour le raid. Mes parents m’ont réellement encouragé à aller jusqu’au bout ».
Le bout, c’était l’Iran, à travers la France, l'Italie, l’ex-Yougoslavie, la Grèce et la Turquie. Le bout, c’était également le retour à Paris sans incident.
Quelle aventure pour les 467 équipages ! Un participant sur deux ignorait tout de la mécanique. Le mécano du binôme Kottmann-Colette c’était Gérard. « Nous nous relayions au volant. Nous étions partis pour 32 jours ».
Serge Kottmann se souvient de l’appui que lui avait apporté « Le Républicain Lorrain ». Le souvenir est intact, les coupures de journaux aussi. Toutes ces impressions refont surface, car les fans du « PPP » viennent de fêter le 40e anniversaire du raid. L’un d’eux, Pierre Lacasta, a même sorti un livre intitulé «Paris-Persépolis-Paris». Un ouvrage richement illustré, préfacé par Jean-Pierre Beltoise.


Pour se procurer le livre, un contact : parispersepolis2cv (AT) orange (DOT) fr 

ou lacasta.pierre (AT ) orange (DOT) fr



Le 15 août 2012, le véhicule de Serge Kottmann rejoint
le musée de la 2 CV de Troisfontaines (Moselle).




samedi 14 janvier 2012

2 CV CROSS DE FREYMING-MERLEBACH, 1974-1975

Ces merveilleux fous roulant
sur leurs drôles de Deudeuches

Grandiose et insoupçonnée. L’immense carrière de
Freyming-Merlebach, creusée depuis des générations
pour envoyer au fond de la mine le sable gréseux de remblayage,
accueille en juin 1974, la cinquième manche
du championnat de France de 2 CV-Cross.
Le pilote Bruno Franco, tête de file de
l'écurie du Creusot, remporte la victoire
devant la révélation du week-end,
Jean Charbonnier, sous les applaudissements
de milliers de spectateurs, dans une arène dominée
par le terril de Sainte-Fontaine et
des falaises ocre aux nuances jaunes et rouges,
dignes des canyons du Colorado.



 
L’endroit, habituellement interdit au public, avait séduit les organisateurs. Et si les Houillères de Lorraine ont donné leur feu vert, c’est bien parce que les responsables de l’ASAC de la Moselle, appuyés par «Le Républicain Lorrain», les clubs locaux de sports mécaniques et plusieurs entreprises régionales, ont su faire face aux garanties exigées.
Deux mois de terrassements plus tard, le circuit en sable compacté se prête aux premiers tours de roue. Pas le sable de l’enduro du Touquet issu de l’érosion de roches sédimentaires, mais géologiquement parlant, du grès en formation riche en oxyde de fer. Un sol rouge-brun, comme la latérite des pistes en «tôle ondulée» de Côte d'Ivoire et de Haute-Volta.
Aucun dépaysement pour les anciens du Raid Afrique, comme le souligne Jacques Wolgensinger. À ses côtés, Marlène Cotton, chef du service compétitions de Citroën, l’autorité souriante, ne se laisse pas distraire. Toujours à vérifier les détails, comme ce dos d’âne qu’elle fait rectifier au bulldozer et à la niveleuse d’autoroute, la veille de la course.
Rien n’est laissé au hasard pour ces deux journées tendues : ni le parc des concurrents avec son ravitaillement aux couleurs de Total, ni l’éclairage mis en place par Cibié pour les épreuves de nuit, ni même les nappes blanches et le service traiteur sous les toiles d’ombrage du pavillon VIP. Car le soleil est de plomb, comme dans la traversée du Ténéré…
Le samedi 22 juin, Bruno Franco remporte la finale de la deuxième catégorie (602 cm3) et Jean-Michel Fouquet celle de la première catégorie (425 et 435 cm3). Toutefois, c'est Michel Blanc (2CV 6) qui gagne la finale "toutes catégories", Jean-Pierre Fouquet étant contraint à l'abandon, tandis que Bruno Franco fait une sortie de piste.
Le dimanche 23 juin, Jean-Michel Fouquet remporte la finale première catégorie.
Jean-Charbonnier (2CV 6) est le vainqueur de la deuxième catégorie. Il prend la première place après l’abandon de Jean Martin qui était en tête, et remporte la finale "toutes catégories" et la super finale, passant devant les frères Franco.
Jean Charbonnier sera donc la révélation de ce 2CV cross, alors qu’il participe à toutes les épreuves depuis 1972, jouant souvent de malchance.
Au classement général final de l’épreuve de Freyming-Merlebach, Bruno Franco reste premier, suivi de Jean Charbonnier et Jean-Michel Fouquet.
Au classement provisoire du championnat de France, obtenu par le cumul des résultats des trois meilleures épreuves, c'est Jean-Michel Fouquet qui occupe la première place avec 800 points, devant Patrick Lapie (740 points). Antonio Franco garde la troisième place avec 620 points alors que son frère Bruno partage la quatrième place avec Philippe Poiraudeau et Michel Blanc (580 points).
 
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Changement de décor l’année suivante, en raison des contraintes de l’exploitation minière. Les organisateurs délaissent l'immense cuvette à l'allure désertique, pour un plateau bordé d'arbres, plus typique de la région.
Les 7 et 8 juin 1975, près de 12 000 spectateurs applaudissent les 118 concurrents inscrits au départ de cette épreuve et assistent à un festival des frères Franco.
Pour corser l'animation, Citroën a invité Yves Heuzé, chanteur et vedette du feuilleton TV "Pilotes de course". Il participe à la compétition et se montre à la hauteur prouvant qu'il savait faire autre chose que du cinéma en matière de cascades.
Venue en force avec 21 voitures au départ, l'écurie du Creusot est bien décidée à faire parler d'elle. Les frères Franco, Antonio et Bruno, en font la démonstration : ils remportent toutes les finales…
Hélas, hélas ! Au démontage qui succède aux épreuves, la voiture victorieuse est déclarée non conforme, et Antonio perd ainsi le fruit de ses efforts. Son frère Bruno hérite de la première place et précède Michel Blanc et Georges Popineau, tous sur 2CV 6.
Les meilleurs en 435 cm3 sont Jean-Luc Arnaud (premier de sa catégorie le samedi et cinquième au général), et Patrick Lapie (premier de sa catégorie le dimanche et septième au général).
A l'issue de cette manche, Jean-Luc Arnaud est en tête du classement provisoire du trophée international avec quatre-vingt-deux points. Il précède l'Espagnol José-Serra Gimenez de deux points et Christian Komaniecki de trois points.
Après ces deux événements, le Colorado lorrain est rendu à son silence assourdissant. Trente ans plus tard, c’est l’arrêt définitif de l’exploitation du charbon. La carrière de Freyming-Merlebach est devenue un écrin du réaménagement environnemental de l’après-mine.

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Texte : Sylvain POST, avec le « Groupement  2 CV cross – France » association loi 1901
Photos : Relations Publiques de Citroën, « Le Républicain Lorrain ». 



1974 : le circuit d'autocross de la carrière de Freyming-Merlebach.
  © Photo aérienne Gilbert Friderich



























































































































































































L'HERBIER DE PIERRE

  
La genèse du charbon
vue à travers ses fossiles

 

Intervention au Musée du bassin houiller lorrain – 13 mai 2004

 
L’exposition que nous venons de visiter m’inspire plusieurs réflexions. Ce qui m’a frappé en premier ce sont les planches de paléobotanique qui tapissent les murs. Elles rappellent ce qu’il a fallu d’intelligence et de talent pour représenter l’ère du charbon à l’état fœtal.


Les éléments qu’elles réunissent s'inscrivent
dans une présentation scrupuleuse, systématique à sa manière,
au service d’un enseignement, d’une évangélisation laïque qui caractérisent si bien un certain esprit scientifique du début du XXe siècle.
Ces planches rappellent l’âge d’or de la paléobotanique et
de la stratigraphie.
 
 

On imagine bien l’utilité des fossiles dans la phase exploratoire du gisement houiller sarro-lorrain.  Car c’est à ce moment là, avant l’arrivée de techniques plus sophistiquées, (on est loin des camions blancs de la sismique…) que la paléontologie végétale a trouvé son utilité et son application.
 
La disposition initiale des sédiments carbonifères a été bouleversée par les phénomènes de compression et de distension qui ont provoqué l’existence de plis, de fractures par étirement, de failles de tassement, quand ils n’ont pas entraîné, dans certains cas, une émersion suivie d’érosion de certains secteurs, enlevant ainsi, par endroits, une partie des sédiments houillers précédemment déposés.
 
Tous ces phénomènes ont rendu difficile la reconnaissance des différents faisceaux et leur raccordement, d’un secteur à l’autre, sur les critères du seul travail des géomètres.
 
Avec la paléontologie, comme la pierre de Rosette, les schistes à empreintes de végétaux ont livré leur grille de lecture. En effet, la flore a progressivement évolué et des associations végétales différentes se sont succédé au cours du temps et elles ont caractérisé certains faisceaux.
 
Ainsi, des fossiles ont acquis le statut de marqueurs stratigraphiques, comme, par exemple, Neuropteris ovata, une fougère à graines décrite par Hoffmann, fossile directeur du Westphalien D qui a permis de déterminer avec une bonne approximation que l’on se trouve dans cette zone. D’où l’intérêt de connaître les frondes, pennes et pinnules de Neuropteris ovata. Les planches de paléobotanique ont précisément servi à cela.
 
Votre exposition a le mérite d’être globale et locale. 
Globale : c’est la dimension que lui donnent les documents généraux et l’horloge géologique que nous venons de voir.
Locale : c’est la dimension que lui assurent les fossiles majeurs du Carbonifère en Lorraine.
 
Ils appartiennent à cinq embranchements :
 
- Les lépidophytes : lépidodendrons et sigillaires en constituent les représentants.
 
- Les arthrophytes : un groupe qui n’est plus représenté aujourd’hui que par les prêles et dont les individus atteignaient la taille d’un arbre.
 
- Les filicophytes : les fougères à sporanges.
 
- Les ptéridospermophytes : longtemps confondus avec les fougères, car pourvus de frondes, mais se reproduisant par graines.
 
- Les cordaïtophytes : gymnospermes primitives arborescentes.
 
Etranges forêts, aux végétaux bizarres, raides, géométrisés. Ils n’étaient encore que les simulacres des arbres qui n’apparurent que bien plus tard.
 
La prolifération, puis la disparition des « fougères à graines » constituent un chapitre essentiel de l’évolution de la flore qui s’était trouvée à l’origine de la formation du charbon. Elles ont d’abord posé une énigme aux paléobotanistes. Leurs frondes ressemblaient à celles des fougères, mais ne présentaient jamais de sporanges. 
 
Ce n'est qu'après 1900 qu'intervint une découverte décisive, certaines graines devaient incontestablement être rattachées à ces végétaux constituant un groupe à part, les ptéridospermophytes, classés parmi les gymnospermes, c’est-à-dire au sous-embranchement des plantes à graines comprenant celles dont les ovules, puis les graines, sont portés sur des écailles plus ou moins ouvertes, au lieu d’être enfermés dans un ovaire, puis dans un fruit clos comme c’est le cas chez les angiospermes.
 
La question n’a plus rien de spéculatif aujourd’hui. Mais on peut en tirer un enseignement et constater que la nature est redoutable quand elle est contrainte d’abandonner un scénario au profit d’un autre. En tout état de cause, elle conserve ses droits.
 
L’étude de la flore fossile révèle, en effet, que certains groupes de végétaux ont exploré toutes les possibilités d’une certaine formule d’organisation pour retourner ensuite à l’immobilité relative ou absolue, et quelquefois disparaître entièrement.
 
C’est le cas du règne éphémère des « fougères à graines » qui se sont éteintes  à la fin du Paléozoïque. Le temps, tout de même, de participer à la constitution du gisement charbonnier lorrain qui a mis cinquante millions d’années à se mettre en place, entre -320 à -270 MA, alors que les terres émergées du Globe étaient rassemblées pour former un super-continent et que l’Europe se trouvait sous les tropiques.
 
L’évolution de la vie rayonne en silence dans les fossiles et nous exhorte à ne pas être indifférents à la planète que nous transmettrons aux générations futures. C’est ce que cherche à traduire « L’herbier de pierre » en montrant, page à page, des végétaux aujourd’hui disparus.
 
Merci d’avoir inséré dans la vie du Carreau Wendel la sortie de « L’herbier de pierre ».
 
Pourquoi cet ouvrage ? Mon père était mineur à Merlebach et nous habitions en face de la centrale thermique de Grosbliederstroff. J’ai compris, étant gosse, comment l’on produisait de l’électricité à partir du charbon – des schlamms plus exactement – via une chaudière et un groupe turbo-alternateur.
 
Mon père m’a initié à la paléontologie, martelant obstinément son espoir de me voir faire des études. C’est avec une bourse des mines que je les ai faites.
 
Lorsque la mine de Merlebach s’est arrêtée, en septembre 2003, j’ai fait le pari de réaliser ce livre, projet auquel je pensais depuis longtemps. Etais-je capable de relever le défi pour le mois d’avril, marqué par la fermeture de La Houve ? Mon intention, à cette occasion, était de rendre hommage aux mineurs, car ils ont été les premiers, pendant un siècle et demi, à feuilleter les pages du grand livre de l’histoire de la Terre.
 
Je me suis souvenu de Saint-Exupéry : «Faites que le rêve dévore votre vie, afin que la vie ne dévore votre rêve».
 
Saint-Ex m’a également appris que « si je n’agis pas, je suis responsable » et que « l’existence n’a de sens que si nous nous sentons liés à autrui, puisqu’on est frère en quelque chose et non frère tout court ».
 
Pour ma part, je me sens en fraternité avec les mineurs et cette publication est ma façon d’apporter ma pierre au bien commun, au travail de mémoire qui s’accomplit dans le bassin houiller lorrain, pour que la culture minière ne soit jamais frappée de nécrose. Mais qu’elle soit - au contraire - la pierre d’angle de la culture scientifique, technique et industrielle profitable aux « enfants du charbon », une culture  propre à cette terre d’énergie qui doit le rester. 

Glück Auf !
 
 
Sylvain Post  journaliste honoraire & auteur




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 - Les premières graines... 



Photo Armand Ribic HBL-Audiovisuel ©