CONFLIT DE DATES EN LORRAINE
La découverte du charbon pour les nuls
On est allé un peu loin en présentant publiquement les
de Wendel comme les
découvreurs, en 1856, du charbon lorrain.
Car les premiers mineurs de Moselle
avait remonté la houille
vingt-cinq ans plus tôt. Bel exemple d’autosuggestion
récurrente
Le propos commence bien. Quatre reproductions de tableaux représentant des
membres de la famille de Wendel sont offertes, ce printemps, au musée de la mine
de Petite-Rosselle. Joséphine de Wendel (1784-1872), Charles de Wendel
(1809-1870), Théodore II de Gargan (1827-1889) et François II de Wendel
(1874-1949) font leur entrée dans l’espace muséographique de l'ancien “Carreau Wendel”.
Dès le lendemain, le traitement médiatique de cette remise nous apprend que ce sont les «Portraits des pionniers du charbon lorrain». «Objectif : pérenniser l’histoire de cette famille d’industriels».
Où est le problème ? On est allé un peu loin, je crois, en affirmant que la famille de Wendel fût «à l’origine de l’extraction du charbon qui a débuté dans le bassin houiller en juin 1856 au puits Saint-Charles, à Petite-Rosselle…». À tenir ce langage, on manque singulièrement de considération pour les mineurs de la première heure, ceux qui ont foncé le puits de Schœneck quarante ans plus tôt. Je ne crois pas que cette antienne, propagée depuis des lustres, dénote une connaissance incertaine de l’histoire chez les passeurs de mémoire. C’est un parti pris. Au nom de quel intérêt ?
Passer à la trappe la période qui commence en 1816 et livre du charbon vers 1830, c’est laisser choir au fond du gouffre le premier chapitre des houillères de Moselle, émaillé de conditions de travail incroyablement périlleuses, d’accidents fréquents, de venues d’eaux, d’éboulements et, aussi, d’un manque sidérant de connaissances scientifiques et techniques, de moyens matériels et de ressources financières.
Mais tout de même. Ces mineurs sont allés jusqu’aux limites de leur épuisement, parvenant au bout de l’effort à remonter le charbon. Aucune comparaison avec les tonnages de la deuxième moitié du XIXe siècle, diront certains. J’en conviens. Doit-on, toutefois, juger l’action de l’homme à l’aune de sa seule contribution au PIB ? Son histoire doit-elle s’écrire en langage mathématique et s’expliquer à partir de chiffres, de nombres, de ratios ? Cela signifierait que l’être humain puisse être dépouillé de ses qualités de chair et d’os, de cœur et d’esprit, et n’avoir avec ses semblables qu’une relation : il ne serait membre de la société qu’économiquement.
Oublier les pionniers de 1816-1830, c’est ingrat, car les efforts des débuts profiteront aux générations suivantes. Ainsi, Charles de Wendel tirera parti des travaux de Schœneck pour parvenir à la “redécouverte ” du charbon lorrain quelques décennies plus tard. Il n’en est pas le découvreur. On peut à la fois encenser l’œuvre des de Wendel et renvoyer à celle de leurs prédécesseurs.
Ce que l’on peut attendre du musée de la mine de Petite-Rosselle, censé faire autorité sur ces questions, c’est qu’il nous dise avec rigueur quand et comment le charbon a été extrait du sous-sol mosellan, qu’il nous détaille la naissance difficile du bassin houiller, avant de nous conter son exploitation industrielle.
Pas simple. Je veux juste faire remarquer que la géologie a façonné un bassin charbonnier continental dont la singularité est d’être à cheval sur la frontière entre l’Allemagne et la France. Un bassin à deux étages superposés : “westphalien” en-dessous, “stéphanien” au-dessus, des appellations qui renvoient à la région d’Allemagne située entre la Weser et le Rhin pour la première, à Saint-Etienne pour la seconde, et qui suggéreraient presque une double nationalité…
Le scénario qu’il faudrait privilégier consisterait donc à favoriser une conscience sarro-lorraine de ce gisement. Concernant la chronologie des événements, il serait logique de remonter à sa première exploitation rationnelle, il y a 250 ans, en oubliant un instant le bornage des États.
Ça tombe bien. La partie sarroise était à l’époque sous la souveraineté française. Cela nous ramène à 1762 et au personnage historique reconnu pour avoir pressenti la valeur économique des richesses du sous-sol de la Sarre : le prince Wilhelm-Heinrich de Nassau-Sarrebruck (1718-1768), qui agissait en bonne intelligence avec le Royaume de France.
Il y aurait donc une meilleure harmonie à trouver dans la manière de raconter la découverte et l’exploitation du charbon sarro-lorrain. Imaginer, afin de rendre intelligible la continuité physique du gisement, un “travers-banc” tracé à la mine de crayon entre Ottweiler et Faulquemont. Un tracé jalonné par l’aventure minière au regard des périodes politiques de notre histoire : l’Ancien Régime, la Ière République, le Premier Empire, la Restauration, la Monarchie de Juillet, le Second Empire. Reprenons…
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Ancien Régime
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D'après l'ancien droit de la France, les mines sont de droit régalien. Au
roi seul appartient de les concéder. S’il existe, en France, des redevances pour
les gisements de minerais métalliques, il n’y a pas, à l’époque, de concessions
au sens strict pour le charbon. Louis XIV accorde en 1698 à tous les
propriétaires du sol, le droit d’exploiter des mines de houille dans leurs
fonds.
Oubliée, la Grande Maîtrise des mines et minières de France que Henri IV avait créée en son temps... Louis XIV, le modèle des souverains et Colbert, le meilleur des conseillers du roi, font preuve d’un réel manque d’intérêt pour le charbon. Ils pensent faux ! Comme si la France du XXe siècle passait à côté des nouvelles technologies…
Louis XV, réparant la faute qu'on avait commise avant lui, replace les mines de charbon comme toutes les autres sous la main du roi : «À l'avenir personne ne pourra ouvrir et mettre en exploitation des mines de houille ou charbon de terre, sans avoir préalablement obtenu une permission du sieur contrôleur général des finances…».
En 1751, le prince Wilhelm-Heinrich de Nassau-Sarrebruck dédommage les anciens propriétaires des terrains houillers et il étatise à sa manière les mines de son vaste domaine. À l’exploitation sauvage succèdent un début de concentration et une stratégie préindustrielle qui seront déterminantes pour l’avenir de ces houillères. Parallèlement, les Prémontrés de l’abbaye de Wadgassen exploitent la houille qu’ils ont sous leurs pieds.
Malgré les circonstances favorables aux princes, en Sarre, l’extraction par galeries atteint à peine 50 000 tonnes sous l’Ancien Régime. C’est peu, mais cette production porte en elle les pronostics sur l’avenir houiller de la région transfrontalière.
La Révolution mènera l’abbaye de Wadgassen à l’effondrement, tandis que les houillères sarroises seront déclarées “propriété de la Nation” le 28 juillet 1791.
Le 13 messidor an II (1er juillet 1794), le comité de Salut Public crée une agence des mines qui deviendra le conseil des mines en 1795. Le Domaine français prend possession de tous les biens des princes de Nassau-Sarrebruck en 1798 et dispose ainsi de l’ensemble des houillères en activité, y compris celles que la noblesse avait affermées à des tiers.
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Premier Empire
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Pour le Premier Empire, à partir de 1804, l’industrie des mines doit être
sinon une industrie d’Etat, tout au moins une industrie dont l’Etat doit diriger
l’exploitation, par l’intervention directe de ses représentants auprès des
exploitants. Napoléon Ier ordonne une mission de reconnaissance du gisement dans
le département de la Sarre occupé par les soldats de l'Empire.
Les ingénieurs du corps des mines dressent un précieux “atlas” et leurs pronostics sur l’avenir houiller de cette région déterminent l’empereur à partager le bassin sarrois en soixante concessions, pour en développer l’extraction.
Les ingénieurs du corps des mines dressent un précieux “atlas” et leurs pronostics sur l’avenir houiller de cette région déterminent l’empereur à partager le bassin sarrois en soixante concessions, pour en développer l’extraction.
Ce sera le résultat du travail acharné des vrais pionniers de l’épopée charbonnière sarro-lorraine, avec à leur tête Jean-Baptiste Guillot-Duhamel , de la promotion de 1783 de l'Ecole des Mines, directeur de l'Ecole Pratique des Mines de la Sarre, à Geislautern, ingénieur en chef, puis inspecteur divisionnaire et inspecteur général des Mines, et ses deux collaborateurs Louis-Antoine Beaunier, de la promotion de 1795, ingénieur en chef des Mines, et Michel-François Calmelet, de la promotion 1800, également ingénieur en chef des Mines.
Les mines françaises de la Sarre sont parmi les premières auxquelles s’applique le “Code minier” créé en 1810…. dont le bicentenaire, il y a deux ans, est passé inaperçu ! Une occasion manquée de monter un colloque, avec mise en perspective d’une loi après-mine.
Mais les événements de 1814 surviennent avant que le projet de Napoléon Ier n’aboutisse. Le second traité de Paris, le 20 novembre 1815, sanctionne le retour de Napoléon de l’île d’Elbe et sa défaite à Waterloo. Il oblige la France à remettre le territoire de Nassau-Sarrebruck à la Couronne de Prusse avec le précieux “atlas” des réserves charbonnières.
Les ingénieurs français ont tellement amélioré la situation des houillères sarroises que leur production a doublé en cinq ans. Nos voisins allemands ne manqueront pas de le souligner à l’occasion de l’adieu à la dernière mine sarroise, le 30 juin 2012, à Ensdorf. On peut apprécier leur fair-play : ils inaugureront un mémorial sur le “ terril Duhamel ”, au nom bien de chez nous, qui domine le panorama de Sarrelouis.
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Restauration
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Restauration
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À moins que le “mal français” ne donne le haut-le-cœur à chaque évocation de Waterloo et du second traité de Paris, il faut bien en convenir : la déculottée face aux Britanniques, Allemands, Prussiens et Néerlandais, a joué en faveur de la découverte du charbon lorrain en contraignant la France à intensifier la recherche sur son propre territoire, amputé de la Sarre.
L’ingénieur Beaunier fait ses valises pour le centre de la France. Appelé à développer le bassin minier de la Loire, il cesse de se partager entre la Préfecture de Metz et l’École des mines de Geislautern, en Sarre et se consacre aux mines des secteurs de Saint-Etienne et Rive-de-Gier. Et là, il révolutionne le transport du charbon dont l’industrie a grand besoin, en créant la première ligne de chemin de fer de l’histoire ferroviaire française, ouverte à la circulation en octobre 1828, entre Saint-Etienne et Andrézieux.
En Lorraine, il ne faut pas être grand clerc pour supputer le prolongement des veines de charbon sarrois au-delà de la nouvelle frontière franco-prussienne, en direction de la Moselle. «Il sembla à l’ingénieur des mines prussien qui inspira aux diplomates l’idée de nous borner si étrangement, que les couches, si elles ne tournaient pas impoliment le dos à la France, passaient cependant sous notre sol à une telle profondeur, que nous n’avions plus de charbon à espérer de ce côté» écrit en 1867 Louis Simonin, l’auteur le plus cité de la littérature minière, ingénieur diplômé de l’École des mines de Saint-Etienne.
Mais, ajoute-t-il, «l’ennemi avait compté sans l’initiative courageuse, hardie, des habitants de la Moselle (…). On se mit résolument à l’œuvre dès le premier jour, d’abord aux environs de Forbach». À Schœneck, précisément.
Pour appréhender la naissance compliquée du bassin houiller lorrain, «il faut prendre les choses à l’origine» avertit Simonin. C’est ce que fait Bernard Desmars, de l’université de Lorraine, dans une brillante étude publiée en 1998, sous le titre “La difficile genèse du bassin houiller lorrain (1815-1870)”.
«Les recherches de houille, les soupçons sur sa présence sont relativement précoces, et la preuve de son existence est acquise dès les premières années de la Restauration», indique cet universitaire.
«Entre 1815 et 1870, écrit-il, le sous-sol mosellan accueille de nombreuses entreprises de prospection et de sondages dans l'espoir d'y découvrir la houille. Cependant, cette attention est inégalement soutenue selon les moments, et les variations de cet intérêt peuvent être enregistrées à travers le courrier reçu à la préfecture, déclarant l'intention de se livrer à la recherche du précieux combustible, ou annonçant sa découverte et la volonté de l'exploiter.
Hétérogène dans son contenu et dans sa fonction, ce courrier témoigne d'une même préoccupation - démontrer la présence de houille - dont l'intensité apparaît particulièrement nette à deux moments : les années 1815-1835 d'abord, les années 1847-1858 ensuite, de façon alors plus brève, mais plus vigoureuse et finalement plus efficace, puisqu'à l'issue de cette seconde période, le bassin houiller sera définitivement reconnu.»
L'entreprise la plus importante, et en même temps la plus précoce, se déroule à Schœneck. Les premiers sondages sont établis dès août 1816 et permettent la découverte d'une couche en novembre 1817. Bernard Desmars précise que la concession est obtenue au profit de trois associés Thieriet, Gangloff et Rupied, par une ordonnance royale du 20 septembre 1820, «malgré des demandes concurrentes et des oppositions déposées par François de Wendel, le maître de forges de Hayange, et les héritiers du duc de Deux-Ponts, propriétaires d'une partie des terrains concernés».
Les trois concessionnaires forment une société anonyme et engagent les opérations. Mais le fonçage du puits est long et contrarié par de nombreuses difficultés qui ralentissent les travaux et en alourdissent le coût. «La houille est rencontrée à la fin de 1829 et l'exploitation peut commencer l'année suivante; des obstacles en limitent immédiatement l'ampleur : l'une des deux galeries ouvertes doit être abandonnée dès décembre 1830, toujours en raison des venues d'eau».
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Monarchie de Juillet
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Monarchie de Juillet
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Sous la Monarchie de Juillet (1830-1848), la houille extraite à Schœneck ne peut guère alimenter que les machines de l'entreprise : «Il n'en sera vendu que pendant les années 1834 et 1835, et encore ne s'agit-il que de très faibles quantités» selon Bernard Desmars. La situation financière compromet l'avenir de la compagnie qui suspend les travaux d'exploitation en novembre 1835.
L'année suivante, les eaux envahissent les galeries et le puits. Le conseil d'administration recherche alors vainement de nouveaux capitaux et sollicite des aides publiques qui lui sont refusées. En 1840, la société est mise en liquidation. Selon “Charbonnages de France”, de 250 à 300 hommes ont travaillé dans cette mine. Ils ont remonté près de 11 000 tonnes de charbon.
Après l’échec de cette première période, dû aux incertitudes scientifiques, aux déficiences techniques, surtout au regard des problèmes posés, aux insuffisances financières des acteurs, la recherche du charbon lorrain ne suscite plus guère d’intérêt de 1835 à 1845.
Une nouvelle étape commence dans l'histoire du bassin houiller mosellan durant les dernières années de la Monarchie de juillet, avec à la fois, la reprise des travaux dans le territoire de Schœneck déjà concédé, et l'extension de la prospection vers l'ouest maintenant appuyée sur une véritable étude géologique menée par l'ingénieur des mines de la Moselle. La puissante publique se montre moins timorée, stimulée par un lobbying efficace.
«En février 1844, écrit Bernard Desmars, les milieux économiques mosellans interviennent auprès des pouvoirs publics : un député dépose à la Chambre « une pétition par laquelle la Chambre de Commerce de Metz et les maîtres de forges de la Moselle exposent l'avantage industriel et financier d'opérer de préférence dans l'Est de la France les sondages de terrains houillers sur les fonds destinés aux recherches minérales » ; en même temps, le président de la Chambre de Commerce demande au Secrétaire d'État aux travaux publics « que des travaux de recherches, c'est-à-dire des sondages, soient faits sur la frontière est du département, dans le voisinage des houillères prussiennes, les gens de l'art ayant la certitude qu'on retrouvera en France les couches de charbon qui de la Prusse se dirigent vers notre pays».
Charles de Wendel, bien évidemment, le sait. La création de Stiring-Wendel naît de la volonté de cet industriel et homme politique, conseiller général et député, gérant de la Maison de Wendel, première société métallurgique de l’Est de la France. «Il transforme en projet ce qui devait être un rêve ou une vision : créer, grâce au chemin de fer, le premier combinat lorrain réunissant fer et charbon». C’est l’éclairage pertinent qu’apporte Marcel Gangloff, instituteur retraité, dans une remarquable contribution à l’histoire de Stiring-Wendel.
La loi de concession de 1845 autorise la mise en place de la voie ferrée entre Metz et Sarrebruck, “la ligne du charbon” devant permettre aux industriels de la région de l’Est de s’approvisionner de manière régulière en charbon dans le bassin de Sarrebruck.
Charles de Wendel est quasi-certain que le sous-sol
de la région de Forbach livrera de la houille. «Les travaux réalisés à Schœneck
l’ont prouvé» note Marcel Gangloff. En 1846, le maître de forges lorrain et un investisseur parisien, le baron
James Tom Hainguerlot, qui contrôle les canaux de la Capitale, rachètent la
concession de Schœneck. Ensemble, ils fondent la Compagnie anonyme des mines de
houille de Stiring et chargent Karl Gottfeld Kind, surnommé “le Napoléon des
sondeurs”, de mener des sondages, non plus à Schœneck, mais à Stiring.
La même année, Charles de Wendel fait commencer la construction d’une usine métallurgique à Stiring : la société des Hauts Fourneaux et Forges de Stiring qui proposera rails et poutrelles en fer puddlé aux diverses compagnies ferroviaires et à la nouvelle société houillère. Elle connaîtra la difficile période de la métallurgie qui persistera jusqu’à 1850, sous la IIe République, se développera sous le Second Empire et fermera en 1897, durant l’annexion à l’Empire allemand.
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Second Empire
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Second Empire
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La première compagnie minière, née sous la Restauration, n'ayant atteint qu'une exploitation irrégulière et éphémère, la véritable naissance du bassin houiller mosellan sera attribuée au Second Empire. Marcel Gangloff indique que «très vite, des veines de charbon sont trouvées à Stiring, mais des problèmes de venues d’eau rendent leur exploitation impossible. La réussite interviendra quelques années plus tard à Petite-Rosselle». C’est après le fonçage d’un troisième puits que l’exploitation du charbon commencera en 1856. Les historiographes se sont si bien emparés de cette date que le commun des mortels est en perte de repères concernant les premiers pionniers de l’aventure charbonnière.
L'ouverture d'autres puits favorisera une croissance régulière de l’extraction. Cependant, l'essentiel de la production houillère de la Compagnie de Stiring sera écoulé au profit de l'entreprise de Wendel, à des prix généralement très avantageux pour l'établissement métallurgique.
Le temps est venu de donner un caractère politique à l’annonce de cette expansion. Agent de propagande zélé et habile, proche du pouvoir impérial qui le décore de la Légion d’honneur, Louis Simonin, auteur prolixe sorti avec le titre d’ingénieur de l’École des Mines de Saint-Etienne, sera le premier à publier qu’ «en 1858, l’Empereur Napoléon III, ouvrant les Chambres, annonçait à la France et au monde, la découverte du bassin houiller de la Moselle, prolongement du vaste et fertile bassin de Sarrebruck. Le fait était désormais définitif, hors de doute». Sous-entendu : on aurait voulu y croire dès 1816 ? Des débuts qu’on s’empresse de reléguer aux archives. Une histoire “sur mesure”.
Simonin s’emploie à diffuser, en France, une idéologie calquée sur celle du patronat. La Révolution industrielle est en marche. Il faut produire du fer. Mélange de minerai et de charbon de bois – abandonné pour le coke obtenu par pyrolyse de la houille – porté à incandescence, le métal devient symbole de progrès. La sidérurgie va édifier des fortunes, façonner une classe ouvrière et redessiner le paysage de régions entières. Sur le continent européen, quatre familles se partagent le titre de maîtres de forges : les Krupp, les Thyssen, les Schneider et les de Wendel. D’autres marqueront cette époque, comme Carl Röchling qui acquiert en 1881 l’aciérie de Völklingen.
Et entre le patronat français et le pouvoir impérial la porosité est grande. Napoléon III en personne, viendra visiter le site industriel de Stiring et sa cité modèle en 1857, l’année même où le nom Wendel est ajouté à celui de Stiring sur proposition du conseil général «…pour remercier Madame de Wendel des sacrifices qu’elle a faits pour la construction des bâtiments affectés aux besoins de la communauté», note Marcel Gangloff. La cité est érigée en commune.
À la veille de la guerre franco-prussienne qui scelle la fin du Second Empire, les résultats de l’exploitation charbonnière à l’actif des de Wendel sont jugées médiocres par la plupart des spécialistes. De leur côté, en 1860, les mines sarroises emploient 11 000 mineurs et enregistrent un volume d’extraction de 2 millions de tonnes.
Quant à l’opinion française, elle reste divisée sur le bilan de Napoléon III, exalté par les uns, déprécié par les autres, en dépit du développement industriel, économique et financier considérable qui a marqué son règne, et de la transformation de Paris par Haussmann.
Paris, Biarritz, Nice, Vichy ou Plombières lui sont particulièrement redevables. Le bassin houiller lorrain, aussi, est prompt à mettre en valeur le Second Empire. Quitte à assumer une contradiction, car cette bonne opinion doit s’accommoder du détestable souvenir de la guerre de 1870 et de la défaite de Sedan qui valurent à la Moselle redécoupée d’être livrée à l’Allemagne pour un demi-siècle.
Pourquoi s’appesantir autant sur les débuts du charbon sarro-lorrain ? J’y tenais, n’était-ce que pour mobiliser l’attention sur ses vrais débuts. À l’évidence, l’essor du bassin houiller de Moselle qui s’ensuivit revêt bien plus d’importance. Et, davantage encore aujourd’hui, sa revitalisation pour le sauver du marasme.
Sylvain Post journaliste honoraire & auteur
Illustration extraite de "La Vie souterraine" (1867) de Louis Simonin
rééditée en 1982 par les Ed. Champ Vallon :
rééditée en 1982 par les Ed. Champ Vallon :
travaux de sondage au cours de la deuxième moitié du XIXe siècle.
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